Lac Édouard

Ma dernière visite à Lac Édouard remontait à mars 2013. Nous avions profité de la relâche en famille pour faire le plein d’énergie et de chaleur humaine dans cette municipalité située au nord de la Mauricie.

Pour notre expédition 2021, nous avons choisi de vivre l’expérience en train. J’insiste sur le terme «expérience», car ce trajet qui longe la rivière Batiscan et le cœur d’une des plus belles forêts du Québec est une véritable aventure. Un voyage de l’intérieur, au sens propre et figuré.

Il y a, bien sûr, ce paysage magnifique des couleurs à ce moment de l’année, mais également la rencontre des personnes pour qui le train est essentiel. Pour avoir voyagé en train entre Montréal et Québec, ce trajet entre Shawinigan et Lac Édouard est tout autre. En effet, à bord de ce train, nous sommes témoins des habitations et des destinations qui ne sont accessibles que par ce moyen de transport. Il est fascinant de constater que le train s’arrête en plein milieu de la voie, voir une passagère descendre pour y retrouver son homme et sa demeure, au bord d’un lac où un feu crépite sur la berge. Après avoir fait le plein de provisions, elle retrouve le calme de cette nature où le réseau cellulaire et wifi ne font pas partie du quotidien.

Trois heures après notre départ de la gare, nous sommes arrivées aux portes du paradis: Lac Édouard. C’est ainsi que nos hôtes ont nommé leur terre d’accueil. Un couple de citadins qui a choisi de s’installer dans cette petite municipalité où le temps s’arrête et où l’instant présent est si facile.

Depuis longtemps, je m’intéresse à la notion de territoire, à cette identité culturelle et d’appartenance qui en découle. Lors de ce voyage, j’ai été habitée de questionnements et de réflexions, tels que : comment nous habitons notre territoire, les effets d’un mode de développement économique basé sur le capital financier sans égard pour les humains et les ressources qui le rendent possible, sur notre vision à court terme qui fait en sorte que l’on ne planifie pas les lendemains d’une industrie ou de l’exploitation d’une ressource. Pendant des décennies, voire des générations, des humains contribuent à l’économie d’un village, en font leur histoire, leur culture, leur identité. Et quand tout cela s’essouffle, parfois même s’éteint, on les laisse en plan avec ce trou béant. C’est là que la résilience fait son œuvre. Car une fois que l’on a laissé ces femmes, ces hommes et ces enfants vivre un territoire, pourquoi faudrait-il le laisser à l’abandon? Surtout, si c’est aux portes du paradis…

Lors de ce voyage, j’ai été témoin encore une fois de la volonté de maintenir la vitalité et de dynamiser cette communauté. Je me suis même sentie solidaire de ce désir de trouver des solutions, des idées pour que ce soit toujours bon de vivre à Lac Édouard. Je souhaite ardemment que les prochaines générations ne répètent pas les erreurs du passé et que l’on planifie notre développement de façon circulaire, de façon durable et respectueuse de la nature et des humains. Lorsque l’on parcourt un tel territoire, on ressent encore plus intensément cette urgence.

Lors du retour en train, j’ai lu ce proverbe Ubuntu utilisé en philosophie africaine: « Je suis, car nous sommes », tout était là, il n’y avait plus rien à ajouter.

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