La transition écologique: un nouvel espace politique?

Je ne sais pas si la transition sociale et écologique est entrée dans votre vie, comme dans la mienne, par la grande porte. Ça m’apparaît une évidence! J’en suis!

J’avais par ailleurs sous-estimé ce que ça pouvait impliquer concrètement… Je croyais naïvement que la transition, voire la décroissance, pouvait s’aborder un peu de la même manière que d’autres préoccupations de justice sociale et de solidarité.

Les changements pour plus de justice sociale et de solidarité portent l’espoir d’une révolution de nos façons de faire et de concevoir le monde qui nous entoure. Dans l’action, on porte cet espoir et on avance pas à pas dans la tempête, un changement après l’autre.

Pour la transition, même si cette logique fonctionne en pratique, elle se heurte à des résistances de natures différentes.

Depuis plus d’un siècle, si ce n’est pas deux, la croissance et le progrès sont intégrés profondément dans nos schémas de pensée[1]. Les partis de droite comme de gauche se préoccupent de la création d’emplois et de richesse.

On débat ensuite de la redistribution de cette richesse, de qui participe aux décisions, des valeurs qui animent les choix et les priorités, etc. C’est un portrait un peu grossier, mais il présente à larges traits notre paysage politique.

Nouvel espace politique

Bien sûr, ce n’est pas d’hier que l’on souligne que le progrès n’est pas que quantitatif ou économique, il est aussi social et qualificatif. Toutefois, nous ne sommes pas rendus très loin dans l’actualisation des valeurs progressistes dans des scénarios de décroissance. Encore moins dans un horizon rapide.

Mes réflexions évoluent et stagnent en alternance depuis mon premier billet sur le sujet, Le grand écart, en janvier dernier. Quoi qu’il en soit, loin de moi l’idée de baisser les bras.

J’en viens maintenant à considérer la transition comme un nouvel espace politique, un nouvel espace de pensée. Il ne s’agit pas uniquement d’une nouvelle forme de lutte au capitalisme ou d’un nouvel idéal de justice sociale.

Il ne s’agit peut-être pas d’une lutte que l’on doit aborder avec la lorgnette du « progressisme » ou de la gauche, même si elle semble préoccuper davantage les progressistes. Un peu comme la question de la souveraineté d’ailleurs.

C’est peut-être une opportunité de voir naître de nouveaux courants politiques et de nouvelles coalitions, jusqu’ici improbables. Espérons que ce nouvel espace offre une occasion de sortir du spectre politique classique, une alternative à la polarisation montante.

Quoi qu’il en soit, cela demeure un défi d’une ampleur inimaginable. Souvenons-nous que le siècle des Lumières, importante période de changement de paradigme, porte justement le nom de siècle. La crise actuelle ne semble pas nous offrir ce luxe.

Espoir

Heureusement, j’ai beaucoup d’espoir[2] en les collectivités pour construire et nourrir ce nouvel espace politique. Je trouve plus réaliste de voir naître des alternatives à échelle humaine.

De nouvelles formes de réponses et de nouvelles solidarités émergent souvent de la nécessité. Je ne peux m’imaginer meilleur lieu que là où les citoyens vivent déjà des conséquences liées aux changements climatiques, de manière concrète.

Bref, en plus de l’évolution des idées, des concepts et des discours[3], il faut que l’action s’ancre quelque part. Je fonde beaucoup d’espoir sur les collectivités pour être ce premier lieu d’ébullition, un lieu de sens et d’enracinement.

 

Crédit photo : Bud Helisson, Unsplash

[1] Je vous invite à lire le dernier devoir de philo du Devoir : Éloge de la stagnation économique. Patrick Muddler nous présente la pensée économique de John Stuart Mill. On y constate que la question de la stagnation de l’économie ou l’état stationnaire était, en quelque sorte, boudée par les économistes classiques.

[2] J’ai récemment découvert Susanne Moser. Dans cette conférence, elle parle de l’espoir. Je vous invite à y jeter un œil. Le début met la table et la seconde partie offre des réflexions vraiment intéressante sur le chemin à parcourir.

[3] À ce titre, pour celles et ceux qui ne sont pas familiers avec le « nouveau » champ de la collapsologie, cette excellente vidéo de l’émission Carbone de Radio-Canada, La collapsologie, c’est quoi? permet de s’y initier.

 

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3 réponses

  1. Belle réflexion Sophie. La question de la transition écologique n’est plus une option, un choix, c’est une obligation. Reste à savoir si nous en prendrons tous collectivement conscience avant qu’il ne soit trop tard. Beaucoup de temps précieux se perd actuellement en discours.

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