Pourquoi les gouvernements ne peuvent dire la vérité au sujet des changements climatiques

Alors que le gouvernement Legault prétend lutter contre les changements climatiques, il importe d’évaluer ses propositions et décisions actuelles et à venir en examinant les a priori de l’analyse qui les justifie.

Tout, tout, tout ce que vous possédez, utilisez ou faites, logis, repas, moyens de transport (électriques ou pas), ordi, cellulaire, emploi, vacances, études, tout cela sans exception n’est possible que grâce aux machines qui sont à notre service, de véritables esclaves mécaniques. Des machines que l’on doit d’abord fabriquer et ensuite faire fonctionner… grâce à une quantité croissante d’énergie.

Or plus de 80% de l’énergie consommée sur cette planète est d’origine fossile non renouvelable, source de la croissance unique du niveau de vie de l’humanité depuis plus de 150 ans… mais également de pollution et des gaz à effets de serre (GES) source de la crise planétaire actuelle.

Depuis le rapport Brundtland, Notre avenir à tous (introduisant la notion de développement durable), rédigée en 1987 sous l’égide de l’ONU, cette croissance mythique que l’on veut infinie dans un monde fini, tabou et dogme, que l’on mesure avec le PIB, n’a jamais été remise en question par aucun des différents sommets internationaux ni par nos gouvernements canadien et québécois.

Progression de l’énergie solaire, éolienne… et fossile!

Que penser de cette stratégie de poursuivre la croissance tout en luttant contre les changements climatiques, alors que, selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE), les émissions de CO2 en continuelle progression depuis 1995 (tenue de la première « COP »), malgré la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC ) en 1992, avaient continué d’augmenter de 2,3% en 2018? Leur rythme le plus rapide depuis 10 ans, malgré la progression de la production d’énergie solaire et éolienne! En fait, un constat s’impose. Les énergies renouvelables ne se substituent pas aux fossiles, elles s’additionnent au parc énergétique mondial face à une demande sans cesse croissante. Il n’y a pas de dissociation (découplage) entre croissance économique et consommation de ressources – énergétiques en premier lieu. Elles sont intimement liées.

Réduire les GES, c’est donc obligatoirement s’attaquer à la croissance. C’est modifier de façon contraignante, par législation, nos habitudes de vie et de consommation, source de notre confort quotidien, de notre emploi, de nos petits et grands plaisirs; comme ce nouveau cellulaire, ce produit exotique ou ce voyage tant rêvé. Lutter contre les changements climatiques, c’est attaquer un mode de vie foncièrement destructeur du vivant, des riches et moins riches d’ici et d’ailleurs.

Toujours plus

Or, quel que soit le positionnement de nos politiciens sur l’échiquier et leurs propositions pour réduire les GES, tous carburent avec des promesses (toujours plus, plus, plus…) qui nécessitent de la croissance, base d’un avenir radieux, source de bien-être, de bonheur durable et surtout, surtout de la richesse pour financer, supposément, des moyens lilliputiens et totalement inefficaces de lutte aux GES.

Notre cerveau est programmé pour éviter ce qui est désagréable ou ce qui apparaît comme une menace réelle ou imaginaire. Comme on dit : il n’y a de pire sourd que celui qui ne veut entendre. Prisonniers du mythe, les politiciens, entre autres, se mentent à eux-mêmes et n’ont au final d’autres avenues que de faire coalition et de nous mentir également. De proposer la course à l’augmentation du PIB pour satisfaire nos insatiables appétits, obtenir notre vote et maintenir le système en place au bénéfice de quelques privilégiées.

Heureusement, nous sommes de plus en plus nombreux, de tous les âges et de tous les statuts à reconnaître la nécessité d’une décroissance contrôlée et non subie, à refuser la résignation malgré l’ampleur des défis et les appels au statu quo des climatosceptiques ou encore des nouveaux chantres de la « croissance verte » tel que présenté dans Le pacte vert pour l’Europe le 19 décembre dernier au Parlement européen. Voilà pourquoi chacun, à sa mesure, peut et doit continuer à poser des gestes de résistances, modifier ses comportements et explorer de nouvelles pratiques permettant de contribuer à la réduction de notre empreinte écologique. Mais, cela est loin de suffire et maintient l’illusion que l’on va pouvoir éviter des changements douloureux à nos habitudes.

Une réflexion locale s’impose

Les grands de ce monde ne mettront pas fin au système qui les sert si bien. Il est donc urgent de développer la capacité des communautés locales à développer des solutions de rechange collectives au modèle actuel de consommation et de production ainsi que leur capacité de résilience dans un contexte de rareté croissante des ressources minérales, pétrolières et agricoles, de perte accélérée de biodiversité et d’extrêmes climatiques.

Cette adaptation incontournable qui demande des innovations reposant sur les low tech, systémiques et sous contraintes de sobriété sur les plans social, culturel, environnemental, économique, climatique, politique, de gestion et de la gouvernance nécessiterait la disponibilité de ressources capables de soutenir les différentes expériences et de faire face aux verrouillages sociotechniques inévitables. Or, ces ressources sont rares ou n’existent tout simplement pas.  Elles devront se développer en fonction d’une réflexion locale sur l’adaptation souhaitée, les aspirations et potentialités de régions naturelles d’appartenance favorisant les liens de solidarité.

Est-ce à dire que le politique n’a aucun rôle alors que les élus arbitrent trop souvent les conflits et les choix d’intérêt collectif en fonction de ceux qui ont le plus de pouvoirs de nuisances face à leur réélection? Malgré cet état de fait quelque peu désespérant et souvent source de cynisme, on ne peut baisser les bras et il faut exiger de nos politiciens, surtout au palier local, qu’ils fassent preuve de courage et soutiennent celles et ceux qui osent se mettre en action (exemple : les budgets participatifs). Question de limiter les dégâts et pas seulement pour les générations futures.

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